Ce n'est que le début .... [Trihesh]

--> [Chambre du Maitre des Métamorphes]

Le trajet ne durera que quelques minutes. Ardhgal sentait que son futur Kiel pataugeait dans l’euphorie. Il semblait aussi qu’il était à l’aise avec lui, seul être à avoir cette attitude avec Ardhgal. Cela prouvait une certaine force de caractère. Il n’avait plus aucun doute sur l’avenir, son choix s’arrêterait là. Il jeta un regarda sur la petite personne à coté de lui. Le détailla avec un trait de convoitise, car ayant cette nouvelle version de Trihesh, il était encore plus appétissant. Tout lui plaisait chez lu, sa gaieté, comme tout à l’heure, vu sa remarque, sa frivolité, sa jeunesse … Son corps. Mais ne brulons pas les étapes, le moment viendra bien vite.

La voiture se gara dans le quartier le plus huppé de la ville, près du restaurant en question. Il descendit de la voiture, avec une nonchalance qui caractérisait son maintient. Puis il attendit que son jeune hôte fasse de même. Ceci fait, ils entrèrent dans le très luxueux établissement, Ardhgal avait des goûts bien arrêtés. Hors de question de manger dans un endroit non coté.
Un maitre de rang, chef des serveurs, vint les accueillir, Cárthaigh se présenta et l’homme s’inclina devant lui avant de les emmener à leur table loin des autres convives. Ils eurent une place de choix, à l’écart, près d’une baie vitrée ou le panorama de la ville était sublime.
Aisément installé, le maitre des Métamorphes prit la carte du menu pour faire son choix. Il regarda Trihesh et se dit qu’il devait certainement le faire pour eux deux. Il commanda donc le même plat raffiné que lui, et une bouteille de vin d’un grand millésime. Après que le serveur fut parti avec leur commande il posa ses mains sur chaque cotés de la table et fixa son jeune ami.

-J’espère que tu ne m’en voudras pas d’avoir imposé mon choix de repas. Mais c’était plus dans mon rôle et cela me paraissait logique. Maintenant j’aimerais que tu me parles un peu plus de toi. Tu n’as pas l’air de quelqu’un qui a souffert de la vie ; pourtant tu es seul sous la pluie et sans bagages, pourquoi ?

Avant que Trihesh ne réponde, le premier plat arriva. Une entrée chaude de petites noix de St Jacques flambé de cognac, sur canapé. Ardhgal prit sa fourchette pour entamer son assiette, et fit un geste pour que son jeune corbeau en fasse autant.

-Tu peux me parler pendant que nous mangeons. Je ne voudrais pas que tu manges froids ces mets délicieux.

Un sommelier vient à son tour couper la conversation, et leur servit le grand vin. L’aigle royal prit son verre entre ses doigts et gouta, tout en gardant le liquide quelque instant dans sa bouche, avant de l’avaler.

-Parfait, dit-il au sommelier. Vous pouvez servir. Celui-ci s’exécuta, et rempli le verre de Trihesh.

Un sourire en coin, le maitre observa le jeune corbeau en face de lui. Il se demandait s’il tenait l’alcool. Allait-il boire le vin même s’il n’aimait pas cela ? Ardhgal aimait tester les gens sur leur volonté mais surtout sur une certaine obligeance envers lui.

-Je ne t’ai pas sollicité pour le vin. Cela ne me paraissait pas très nécessaire. Mais si tu veux il y a de l’eau pour toi. Je ne t’oblige pas à boire de l’alcool.

C’était mesquin de sa part, il n’avait certes pas envi de le voir saoul. Il n’aimait pas les gens qui boivent pour ne pas se rappeler ce qui s’est passé. Non lui il désirait ardemment qu’il n’oublie rien, absolument rien. Mais l’alcool aide aussi à se laisser aller un peu plus mais toujours sans exagération. Dans un sens il le faisait exprès et en avait totalement conscience.
Le plus important, pour le moment, était qu’ils finissent rapidement leur repas pour que commence les réjouissances. Les vraies ….

Trihesh s'attendait à débarquer dans un endroit tout aussi beau que la demeure qu'il venait de quitter ; il eut le temps d'imaginer toute sorte de restaurant, tous plus colorés et richissimes les uns que les autres, mais lorsque la réalité s'offrir à lui, en descendant de voitures, tous ces songes furent bien vite effacés. Le bâtiment qui se tenait devant lui était d'un esthétique sans pareil. Il n'eut malheureusement pas le temps de l'admirer de l'extérieur, Ardhgal l'invita de suite à y pénétrer.

Trihesh avala sa salive. Un parfum exquis se dégageait dans l'ambiance feutrée du restaurant. Jamais, de sa vie entière, il n'aurait pu profiter d'un tel honneur, s'il n'avait pas été en la compagnie du Maître des Métamorphes. Ce genre d'endroit était hostile au gens de son rang, d'ailleurs, le jeune corbeau se sentit un peu tendu, d'un coup, d'être ainsi parmi tant de nobles alors que lui ne venait même pas de la rue. Il cacha ce trouble, qui était de toute façon combattu par l'extase visuelle et olfactive.

Une fois installé, il admira la vue qu'offrait la baie vitrée sur la ville aux milliers de lumières. "Je n'ai jamais rien vu d'aussi beau...", songea t-il. Avant même de le constater, Ardhgal avait passé commande. Trihesh se dit que ça n'était pas plus mal, il aurait eu trop de difficulté à choisir un plat dans ce menu très certainement richissime en tentations gustatives. Mais... aurait-il les mêmes goûts que son hôte ? Il déglutit. Puis l'Aigle lui demanda de lui parler de lui, et fort heureusement, le plat arriva à ce moment-là. Trihesh, malgré sa sociabilité et la compréhension dont il faisait preuve envers qui les désirait, n'aimait pas parler de lui. Précaution ? Méfiance ? Sûrement pas. Humilité plus qu'autre chose. Il fit mine d'être étonné par la contenance de son plat, et en réalité, il l'était réellement. Il n'avait jamais rien vu de tel, il ignorait ce que cela pouvait bien être. Mais l'odeur qui s'en libérait donnait l'eau à la bouche... il goûta donc alors qu'Ardhgal lui parlait à nouveau. Et une fois de plus, ils furent interrompus par l'arrivée d'un sommelier, qui servit le vin à la couleur resplendissante dans deux grands verres, après que le Maître l'ai goûté. Le jeune corbeau n'en avait jamais bu mais en avait entendu parler ; il savait que cette boisson faisait partie des alcools, et sa mère humaine, Anith, lui avait toujours déconseillé d'en consommer.

Il lança un regard à Ardhgal. Non, il ne pouvait pas lui dire que sa mère lui avait interdit de boire du vin, cela paraitrait grotesque dans ce lieu et cette ambiance si magique.

"- Il y a de l'eau pour toi. Je ne t'oblige pas à boire de l'alcool."

Le jeune homme lui répondit par un sourire quelque peu gêné.

"- Non, ne vous en faites pas ! Tout ira très bien !"

Et aussitôt, il saisit son verre et but une gorgée de cette boisson aux allures plus nobles que la réputation dont il avait ouï dire. Une sensation toute nouvelle et plutôt désagréable s'empara de sa gorge ; elle brûlait et son palais devenait rugueux. De fines larmes lui montèrent aux yeux. Trihesh tenta de dissimuler sa détresse sous un rire forcé.

"- C'est très... très bon..."

Il attrapa sa fourchette en engloutit une noix de St Jacques, qui elle, avait une consistance et un goût réellement plaisants. Il se sentait honteux. Malgré ses efforts, son désarroi devait se voir et déplaire à l'Aigle royal. Il aurait voulu se forcer à reprendre une gorgée, pour prouver à son hôte que tout allait bien mais le goût âpre du vin était encore collé à son palais.

"- Ça aussi c'est très bon ! dit-il en indiquant son plat avec son menton, vous avez fait un excellent choix, merci !"

Tout faire pour détourner la conversation à son propos. Il sentait bien qu'Ardhgal n'allait pas en rester là mais tant qu'il pouvait esquiver, tout était bon.

[Comme tu voulais que se soit un peu rapide alors voilà. Tu peux poster après ça et nous irons direct à l'habillage ]

Tout se passait pour le mieux. Le diner était parfait, l’ambiance charmante et un jeune être des plus exquis. Il suffisait juste d’apprécier l’instant. Mais un des convives avait bien autre chose en tête, trop habitué à ce genre de diner. Tout en mangeant, Ardhgal jetait des petits regards en direction de Trihesh. Il avait pris son verres avec précipitation, un peu trop à son gout. Il but une gorgée, son visage se décomposait au fur et à mesure que le vin s’écoulait dans sa gorge. Pour un palais non initié cela pouvait être une sensation très désagréable. Le maitre des Métamorphes aurait préféré qu’il lui avoue qu’il n’en avait jamais bu que de voir ses yeux larmoyés. Il avait beau essayer de le lui cacher, néanmoins le vue de l’aigle royal percevait tout. Rien ne lui échappait pas même ce faux éclat de joie.
Ardhgal n’insista pas pour autant, les moyens de l’amener à lui étaient nombreux, et cela l’arrangeait en fait.
Ils dégustèrent leur entrée en silence. Ardhgal attendait toujours qu’il lui parle de lui, mais rien ne venait. Aurait-il des choses à cacher ? Quelque chose d’inavouable ? Cette pensée lui était agréable, bien qu’il ne voie pas Trihesh faire de grosses bêtises. Ils finirent en même temps leurs assiettes. Le maitre eut pitié de son jeune ami et prit la carafe en cristal remplit d’eau et le servit dans son deuxième verre, prévu à cet effet.
On vint leur retiré l’assiette sale, pour la suite. Ardhgal posa ses coudes sur la table pour placer ses mains sous son menton. Il contempla le corbeau, et venait vers la première question.

-Alors Trihesh, qui es-tu exactement ? J’aimerais vraiment en savoir un peu plus sur toi. Tu n’es pas obligé d’entrer dans les détails.

Ceci dit, le maitre des Métamorphes adorait aussi les mystères. Lui-même tentait toujours d’esquiver certaines questions et faisait planer les doutes.
Un serveur arriva avec le plat de résistance, un succulent magret de canard dur lit de légumes. Le repas allait être vite bâclé, son impatience pointait son nez. Il avait déjà attaqué son repas, guettant en même temps les réactions de Trihesh. Celui-ci n’était pas bavard sur sa vie, mais il avait un sacré coup de fourchette et mangeait de bon appétit. Ce qui lui fit plaisir. Le reste du repas continua ainsi, fromage et dessert se succédèrent jusqu’au café. Ardhgal leva la main pour faire venir le maitre d’hôtel avec l’addition, puis il lui donna sa carte bancaire. Ses yeux alla vers son jeune Kiel.

-Tu ne semble pas en dire plus, ce n’est pas grave … Pour le moment. Alors nous allons te vêtir décemment. Au moins je connaitrais tes gouts vestimentaires.

Il se leva, l’enjoignant de faire autant. Il reprit sa taille et en se penchant vers lui.

-Un jour, tu me diras tout de toi. Je veux savoir tout de l’être qui restera auprès de moi. C’est ainsi, le contraire … Non, je ne crois pas qu’une énigme puisse faire l’affaire.

Tout se passait bien. Trihesh dégustait un repas comme jamais il ne lui avait été donné de le faire ; tout, mis à part le vin, avait un goût exquis et raffiné. Chaque bouchée lui donnait envie de passer immédiatement à la suivante ; s'il avait été seul, le jeune corbeau aurait très certainement utilisé ses mains afin d'apporter la nourriture plus rapidement à lui, mais en présence d'Ardhgal, et dans un contexte aussi somptueux, il se contentait de sa fourchette, elle-même luxueuse jusque dans le moindre détail des gravures sur son manche. Puis les assiettes furent finies, Trihesh essuya délicatement les coins de sa bouche ; il pensait que le Maître des Métamorphes aurait attendu plus longtemps avant de lui reposer ses questions quant à son passé... mais non, il revint à la charge. Avec certes un regard que le jeune homme ne put fuir tant il était intense.

Une nouvelle fois, une assiette arriva et sauva son silence. Ardhgal insistait. Le corbeau trouvait cela à la fois touchant, cela prouvait de la curiosité, de l'intérêt envers lui, mais en même temps, ce n'était pas la bonne question. Trihesh n'avait pourtant rien à cacher de spécial, objectivement. Il considérait juste que parler de sa misérable vie n'était pas quelque chose d'intéressant à faire. Il sourit intérieurement... non, bien sûr que c'était plus profond que ça, et il ne sentait pas encore la force de tout dévoiler à cet homme. Il se contenta donc de lui sourire avant de reprendre le repas ; il fit de temps en temps une remarque sur le goût admirable des aliments, sur la beauté des lieux et la gentillesse que le Maître avait eu de l'accueillir ici. Il n'eut cependant pas le courage de boire sa tasse de café, mais Ardhgal ne sembla pas en tenir compte, comme aspiré dans d'autres pensées.

"- Tu ne sembles pas en dire plus." déclara ce dernier.

Trihesh eut une bouffée de chaleur ; lui qui s'était promis de ne plus le décevoir, les choses n'allaient pas bon train... l'Aigle royal n'en semblait pas affecté pour autant, le corbeau put même déceler une forme d'impatience dans sa voix lorsqu'il lui présenta l'idée de lui trouver des vêtements. Le jeune homme se sentait un peu poupée de chiffon mais se faire ainsi entretenir était agréable au possible. Ardhgal avait dans la hâte de faire de lui son égal, aussi beau, aussi riche. Personne n'avait jamais voulu le rehausser, c'était une première troublante mais intéressante. Trihesh se leva donc, la main du Maître retrouva de suite sa place dans la courbe de sa taille et il se sentit bien ainsi.

Il sentit la chaleur du visage d'Ardhgal se rapprocher du sien, faisant naître un petit fard le long de ses joues. Puis les paroles... Trihesh se sentit totalement dépourvu de forces face à une telle volonté, face à une telle détermination, une telle assurance. Cet homme en face de lui avait réellement dans l'objectif d'en savoir plus sur lui, cela le flattait énormément, c'est pourquoi son fard passa à une couleur beaucoup plus expressive. Cette sensation était déconcertante, mais pas désagréable. Le jeune corbeau revit l'image d'un dieu à travers l'intensité de la voix de son Maître, il lui apparaissait à cet instant précis, une fois de plus, comme la personne divine à suivre et à servir où qu'elle aille et quoi qu'elle fasse. Il eut une envie... une envie floue, pas réellement orthodoxe, celle de se rapprocher encore plus de lui et de goûter à ses lèvres.

Ses jambes tremblèrent jusqu'à la remontée en voiture, qui prit la direction du centre-ville, là où les lumières étaient les plus intenses et les plus belles. Le jeune corbeau ne savait pas quoi penser de lui. Il n'osa pas s'avouer ses espoirs, trop nombreux pour les mettre en ordre, de toute façon.

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