[< le hall d'entrée]
"- Très bien, comme tu as l'air satisfait, tu peux t'installer."
Trihesh était ravi de cet accueil si chaleureux et presque gratuit ; presque, car il ne savait pas encore comment tout cela allait se dérouler, peut-être l'Aigle royal allait-il lui demander de payer plus tard ? Toujours était-il que ce dernier n'avait rien attendu de plus et l'avait laissé dans cet superbe chambre, pour s'installer, se mettre à l'aise. Il disposait donc d'une heure pour prendre connaissance du lieu. Les paroles de son hôte le firent doucement rire... "s'installer"... mais il n'avait même pas de bagages, il n'y avait donc rien à mettre en place. Juste lui-même.
Il fit cependant le tour de la chambre, admirant chaque détail. En soi, la pièce était plutôt ordinaire, mais le jeune corbeau n'en avait jamais connu de telle. Depuis son éclosion, il n'avait dormi que dans un nid d'infortune fait de paille et d'herbe, puis, après avoir découvert sa forme humaine, sur un amas de vieux tissus étendus à même le sol. Ici, il possèderait un lit sur pieds, avec des draps, des couvertures, des oreillers. Un confort qui ne lui avait jamais été offert. Il y avait aussi des rideaux aux fenêtres, des meubles, des tapis, des tableaux... du luxe.
Trihesh soupira d'aise en essayant le lit. Doux, ni trop dur, ni trop mou. Parfait. Allongé, les yeux fermés, il fit silence et écouta la pluie qui ne cessait de tomber dehors. Des grosses gouttes. Violentes. Froides. Qui aveuglent de leur nombre. Il écouta leur mélodie ; elle avait quelque chose de reposant mais aussi de menaçant. Et puis, en faisant bien attention, il entendit autre chose que la pluie... comme une voix familière. Il rouvrit les yeux et se précipita vers la fenêtre la plus proche ; il chercha quelque chose mais en vain, il ouvrit donc la fenêtre pour mieux y voir. Et sur une branche d'un arbre hautement dressé non loin du bâtiment, il vit un corbeau. Ce dernier croassait avec insistance, fixant Trihesh dès lors qu'il avait ouvert la fenêtre. Les deux corbeaux firent alors silence et échangèrent un discours muet. Pendant longtemps, très longtemps, leurs yeux se racontèrent des choses que seuls les corbeaux peuvent comprendre. Et lorsque la discussion prit fin, une fois que le corbeau fut parti à tir d'ailes, bravant la pluie et le vent, Trihesh se rendit compte qu'il était sûrement l'heure de rejoindre son hôte.
N'ayant aucune notion du temps, il hésita entre rester un peu et aller frapper à la porte de l'Aigle royal ; il ne voulait surtout pas se montrer impoli en arrivant trop tôt. Finalement, après avoir pesé le pour et le contre, il ferma la fenêtre et se dirigea vers la sortie, et emprunta le couloir sur une courte distance pour se retrouver devant la porte de son hôte. Il frappa.